Pour Léo, le choix était déjà fait. Il avait envoyé sa candidature à la société de production Eumédia et attendait la réponse, sans avoir beaucoup d’espoir. Il se doutait que les demandes affluaient chaque jour par milliers. Sa situation était meilleure que celle de Maylis, car il lui arrivait de travailler. Cependant, il n’exerçait pas un métier de rêve : il était éboueur intermittent, payé à la tâche. C’était un travail pénible, particulièrement en ces périodes de grande chaleur. Elles s’étalaient quasiment de mai à octobre. Léo savait que les étés n’avaient pas toujours été aussi longs et qu’ils étaient la conséquence de ce que les hommes avaient fait durant les siècles précédents. Ils avaient ravagé une planète complètement surpeuplée. Fort heureusement, une solution avait été trouvée pour éviter les famines : on faisait de la nourriture à base d’insectes.
C’était même l’une des meilleures qui n’ait jamais été élaborée, puisqu’elle était riche en protéines et pauvre en matières grasses.
Au moins, les gens peuvent garder la ligne, se dit Léo en regardant ceux qui se trouvaient autour de lui.
Ils étaient très nombreux. Ce parc était l’endroit le plus fréquenté de la ville parce qu’il était le mieux aménagé. Les feuillages des arbres couvraient presque entièrement le ciel et de l’eau coulait dans des bassins. On avait pris l’habitude de s’y rendre en maillot de bain, quoique l’on ne pût s’immerger que jusqu’aux cuisses.
Léo ne portait qu’une paire de sandales, et un slip de bain qui avait l’avantage de dévoiler son corps athlétique. Il coupait ses cheveux très courts, et se laissait pousser un peu de barbe. Il avait conscience de plaire ainsi aux filles, mais leur comportement l’exaspérait. Quand il en abordait une, il se voyait presque toujours proposer un acte tarifé. Il avait certes connu des filles qui s’étaient attachées à lui, mais elles avaient toutes fini par lui reprocher de n’avoir pas grand-chose à leur offrir. Il n’était pas le prince charmant des séries romantico-pornographiques et ne serait même pas capable d’élever un enfant autrement qu’en lui permettant d’aller cinq ans à l’école pour savoir lire et écrire.
Parfois, les coutumes jouaient également en défaveur des femmes. Si une séduisante demoiselle s’en allait dans les rues pour vendre quelques marchandises, ce qui était en théorie tout à fait possible, les hommes lui demandaient plutôt fort poliment de retrousser sa robe ou de montrer ses seins. Ce n’était pas répréhensible.
Léo regarda le concentré de nanotechnologie qu’était sa montre connectée. Pour le moment, elle n’indiquait que l’heure, mais il était susceptible de recevoir un message lui demandant de ramasser des ordures ou, de manière beaucoup plus improbable, une réponse d’Eumédia.
Il se dirigea vers l’un des bassins, entre des personnes assises ou allongées sur l’herbe. Celles qui n’étaient pas en maillot de bain vivaient probablement dans la rue. Elles ne dormaient pas sur place, car la municipalité ne voulait pas que ce parc fût transformé en un squat surpeuplé. Pour faire pression sur elles, il existait un moyen très simple : la nourriture offerte par l’État. Les citoyens désobéissants pouvaient en être privés. Ils trouvaient toujours de quoi survivre, parfois en demandant tout simplement à des proches de partager leurs rations, mais dans d’autres cas, c’était plus difficile.
Léo s’assit au bord du bassin et regarda un homme et une femme en train de rouler sur l’herbe en s’embrassant. Ces moments de bonheur lui manquaient. Peut-être devait-il se remettre à la drague, mais en ce jour, il ne s’y sentait pas d’humeur.
Une jeune et superbe brune s’approcha de lui en se déhanchant. Les rondeurs affriolantes de sa poitrine étaient offertes à la vue de tous. C’était ainsi que beaucoup de prostituées racolaient, quand elles pouvaient être fières de leurs seins. Il y en avait même qui se promenaient sur les trottoirs entièrement nues.
Alors, beau gosse, tu es seul ? dit-elle.
Ouais, on dirait.
Ça te dit de passer l’après-midi avec moi ?
Belles hanches et poitrine joliment modelée, se dit Léo.
Comme tout le monde ici, cette demoiselle était artistiquement bronzée, y compris sur les seins. Voilà au moins un luxe qui ne coûtait rien.
Ça me coûtera combien ? demanda-t-il.
Rien. Pour toi, ce sera gratuit.
Léo n’en crut pas ses oreilles.
Attends ! fit-il. Je ne me trompe pas ? Tu es bien une putain ?
Oui, j’en suis une. Mais ça m’arrive de coucher avec un mec pour mon plaisir.
Qu’est-ce qui me vaut cet honneur ?
Tu es un beau gosse. Ce n’est pas une raison suffisante ?
Le jeune homme demeura sceptique.
Tu crois que je cherche à te rouler ? fit-elle. Ou que je te cache quelque chose ?
Elle s’approcha de Léo jusqu’à lui toucher les genoux et baissa sa culotte. Le jeune homme aperçut un sexe rasé, d’où une petite lèvre dépassait.
Tu peux mettre les doigts dans ma chatte dès maintenant, dit-elle.
Les femmes qui vivaient de la prostitution avaient le mérite d’être directes. Malgré la libération complète des murs, les femmes draguaient peu et ne s’exhibaient pas avec une telle impudeur. Léo comprit qu’il avait affaire à l’une de ces prostituées qui officiaient intégralement nues, pour le plus grand bonheur des hommes de la ville. Tout le monde pouvait les contempler gratuitement.
Puisqu’il n’y a pas anguille sous roche, j’accepte, décida-t-il. Je trouve que tu es très gentille. Beaucoup de prostituées sautent sur des hommes qui leur plaisent et se font payer pour être baisées.
La plupart du temps, c’est justifié, répondit la fille. On risque de tomber sur des hommes qui veulent nous mettre une queue énorme dans le cul ou qui ont toutes sortes de perversions. Tu ne le sais pas ?
Non. Je ne suis pas une femme.
Mais tu n’as pas quelques amies prostituées ?
Léo partageait un appartement avec un couple et une femme qui avait une quinzaine d’années de plus que lui, et avait autrefois beaucoup racolé. Il savait donc très bien ce qu’étaient les prostituées, mais il n’approuvait pas leur comportement trop souvent abusif.
Tout en y pensant, il se voyait déjà caresser les seins de cette fille. Ce qu’il avait vu de sa chatte était également tentant. Quant à ses yeux marron en amande, il n’osait pas plonger son regard dedans par crainte d’y perdre son âme. Elle avait dû remettre sa chevelure entre les mains d’un coiffeur professionnel peu de temps auparavant.
Oui, je sais comment ça marche, confirma-t-il. Ne t’inquiète pas, je vais être correct avec toi.
Je ne te demande pas de l’être. Tu pourras me sodomiser ou m’éjaculer sur le visage. J’ai une grosse envie de baise.
La fille avait une idée de ce qui l’attendait en regardant le slip de bain de Léo, dont la bosse était en partie due à son érection. L’idée de culbuter une jolie inconnue, tout juste rencontrée dans la rue, l’excitait énormément.
Rien ne lui interdisait d’arracher immédiatement la culotte de la fille, la nudité et les actes sexuels étant autorisés dans l’espace public, mais les gens gardaient une certaine retenue. Les bouleversements de l’histoire n’avaient laissé que quelques vestiges de morale, l’État se chargeant de dire ce que l’on ne pouvait pas faire. La surveillance généralisée de la population avait entraîné une disparition quasi complète des crimes et délits, ainsi qu’une révolution des mentalités. Elle donnait paradoxalement une grande liberté dans certains domaines, autorisant des comportements qui auraient été impensables en d’autres temps.
Tu m’offres combien d’heures ? demanda Léo.
Je ne sais pas… jusqu’à ce soir.
Et ton travail ? Qu’est-ce que tu en fais ?
J’ai été baisée par deux hommes ce matin. Ça me suffit.
Et tu comptes te reposer en te faisant baiser par un troisième ?
Oui.
Bon…
Léo se leva et invita la fille à quitter la piscine. Elle chercha un escalier où il la rejoignit.
On cherche un endroit calme ? dit-elle. Tu m’emmènes chez toi ?
D’abord, tu t’appelles comment ?
Juliette.
Et moi, Léo.
Il referma son bras sur la jeune fille, l’attira à elle et caressa sa peau tiède et soyeuse, rafraîchie par son séjour dans la piscine. Les pointes de ses seins touchèrent son torse.
Tu as des sandales ? s’enquit-il.
Non. Je marche pieds nus.
Alors on va se balader. Il y a trop de monde ici.
Ils partirent enlacés comme un couple d’amoureux. Juliette louchait sur les pectoraux de Léo et sur la bosse de son slip. Quant à lui, il la détailla tout entière et caressa sa chevelure qui lui tombait harmonieusement sur une épaule.
…………………………………………………………………………………………………………………………………………….
Le jeune homme entraîna Juliette dans une ruelle où plusieurs familles vivaient. Des bâches avaient été montées pour se protéger de la pluie. Malgré ces abris de fortune, le lieu était propre. Léo savait pourquoi, puisque c’était des gens comme lui qui étaient chargés de les nettoyer.
Ils arrivèrent derrière les immeubles et trouvèrent un petit jardin où ils n’étaient nullement à l’abri des regards, mais un mur avait un renfoncement qui pouvait servir d’alcôve. À côté, Léo vit une porte ouverte, passa la tête dedans et distingua dans la pénombre un vieil homme en train de somnoler sur le sol de ciment, la tête sur un coussin.
Dès qu’il plaqua Juliette contre l’alcôve, elle plongea les mains dans son slip pour en extraire son braquemart.
Ça te démange tellement ? fit-il avec le ton du reproche.
J’avais hâte de voir ta queue.
Juliette la décalotta et la masturba en la serrant fortement, avec les deux mains, comme si elle avait voulu faire jaillir immédiatement la semence du jeune homme. Ce phallus n’avait pas une longueur exceptionnelle et conservait un peu de souplesse, alors que l’érection du jeune homme devait être à son maximum, mais il était un parfait instrument pour combler un vagin. Juliette ne souhaitant cependant pas être pénétrée immédiatement, elle continua à faire courir ses mains sur ce membre. Elle ne s’arrêta que pour avancer les doigts vers les testicules de Léo qui dépassaient tout juste de son slip, et les tâter avec la plus grande délicatesse. Celui-ci restait passif, car les caresses de Juliette le mettaient sur le chemin de la jouissance et qu’il entrevoyait la possibilité de se répandre sur sa peau humide de transpiration.
Leur jardin était un four, car les rayons du Soleil y pénétraient sans être atténués par la végétation, si bien qu’une véritable étreinte n’était pas envisageable. Léo posa seulement ses mains sur les hanches de Juliette et les fit monter vers ses seins, pendant qu’elle continuait à lui presser son sexe. Il encercla ses mamelons avec les doigts et tenta de les tourner comme s’ils avaient été les boutons d’un appareil électrique.
Les efforts de Juliette portèrent leur fruit : le pénis de Léo gonfla encore et s’emplit de sensations qui annonçaient une explosion imminente.
Ahhh… grogna-t-il. Vas-y moins fort ou ça va déjà se terminer.
Je te ferai éjaculer plusieurs fois avant la fin de la journée.
Puisque tu y es, pourquoi tu ne me suces pas ?
Ça ne te plaît pas, ce que je te fais ?
Si, mais suce-moi un peu. Quand tu m’auras fait gicler, ce sera à mon tour de te donner du plaisir.
Juliette répondit à Léo par un sourire et se baissa. Elle fit le tour du gland avec le bout de sa langue, taquina le frein et plaça le membre dans sa bouche. Elle effectua la fellation en s’aidant de la main droite. Tandis qu’elle uvrait, Léo sentit une présence, se retourna et vit un homme qui se tenait au milieu du jardin et les regardait. Il lui adressa un clin d’il. Cet individu était en caleçon et venait sûrement de l’un des immeubles voisins. Il reprit sa marche pour mieux voir Juliette, dont le visage était caché par les fesses de Léo, puis il s’en alla. Le jeune homme eut un sentiment de fierté en pensant qu’il se faisait sucer gratuitement par l’une des plus belles femmes de la ville. Comme il rencontrait Juliette pour la première fois, il supposa qu’elle n’était pas de son quartier.
L’approche de l’orgasme interrompit le cours de ses pensées.
J’avale ? demanda Juliette.
Oui.
Elle se mit à pomper le phallus de Léo avec une ardeur accrue, jusqu’au moment où la jouissance déferla dans le corps du jeune homme. Il émit plusieurs jets dans la bouche de sa partenaire en poussant des cris de bête agonisante. Juliette continua à lui serrer un instant le sexe dans sa bouche, puis elle le retira en posant le bout des doigts sur ses lèvres. Une écume de sperme y apparut. Elle l’avala et s’en pourlécha.
Ça t’a plu ? demanda-t-elle en se relevant.
Parfait !
L’esprit secoué par ce séisme, Léo ne trouva pas d’autre mot. Après avoir remis son slip en place, il approcha ses doigts puis son visage de celui de Juliette comme pour l’embrasser sur la bouche, mais il déposa un baiser humide sur chacun de ses yeux. Elle s’empressa de fermer les paupières, tout en se laissant gagner par un frisson d’envie pour ce mâle qui l’immobilisait contre le mur comme pour mieux s’emparer d’elle, mais restait très tendre.
Qu’est-ce que tu fais ? murmura-t-elle.
Puisque tu m’as vidé, je vais m’en tenir aux préliminaires.
Après avoir survolé la bouche de Juliette, les lèvres et la langue de Léo se dirigèrent vers une joue. L’odeur de sa salive gagna furtivement les narines de Juliette. Le jeune homme lâcha ses bras et se baissa pour mettre sa bouche à la hauteur des seins, aux proéminents mamelons bruns durcis. Il en aspira un dans sa bouche et le suça à la manière d’un bébé, tout en triturant méchamment la chair de l’autre téton. La poitrine de Juliette devint pour elle une source de délices qui se propagèrent dans son corps et provoquèrent un tel alanguissement qu’elle se sentit flancher. Elle rêva d’être allongée, avec Léo penché sur elle, et de se livrer corps et âme à ses caresses. Cependant, il éloigna sa bouche tout en retenant son mamelon et tira dessus jusqu’à en faire rayonner de la douleur. Quand il le lâcha, le sein reprit sa forme arrondie sans conserver de trace de ce moletage.
Léo poursuivit sa descente en léchant la peau satinée et chaude du ventre de Juliette, sans oublier son nombril. Une fine pellicule de sueur la recouvrait. Quand il arriva au niveau de la culotte, il la baissa d’un geste si brusque qu’il aurait pu provoquer un déchirement. La jeune fille poussa un petit cri.
Je me demande à quoi ça rime de porter ce morceau de tissu, dit-il. Pourquoi tu ne te balades pas complètement nue ?
Ça ne m’a pas empêchée de t’accrocher.
L’explication était que Juliette n’avait pas quitté son appartement pour racoler, mais seulement pour vagabonder, et que quand elle avait vu Léo, elle avait décidé de lui sauter dessus.
Je condamne à rester comme ça, déclara-t-il.
Fais de moi ce que tu veux, répondit-elle, emportée par l’envie de s’exhiber en sa compagnie.
Le vagin brûlant de Juliette réclamait la pénétration, mais en faisant éjaculer Léo, elle s’était privée d’un coït en règle. Comme il avait une connaissance intime des sexes féminins, Léo voyait que ce fruit était mûr. Un effleurement de l’index lui en avait fait sentir le jus. Après avoir jeté la culotte au loin, il effectua une incursion sauvage dans le vagin de Juliette en y enfonçant deux doigts en même temps. Elle réagit par un gloussement et un spasme.
Ça te va ? demanda Léo.
Oh oui !
Je te balade comme ça ?
Qu’est-ce que tu veux dire ?
J’ai souvent vu des femmes tirer des hommes par la pine, mais un homme qui tire une femme par la chatte, c’est plus rare. Viens, on va faire un tour.
D’un mouvement brusque, il sortit Juliette de ce renfoncement qui ne les avait pas du tout protégés des regards. Léo fit un demi-tour sur lui-même et prit le chemin par lequel il était venu, l’index et le majeur toujours plantés dans le sexe de Juliette, recourbés afin de bien le crocheter. Celle-ci avait la respiration saccadée sous l’effet de ses éclairs de jouissance, d’autant plus violents que la main de Léo encerclait son clitoris. Le fait de marcher accentuait ce tumulte.
Pour Léo également, l’expérience était agréable. Il appréciait de sentir ses doigts enserrés dans cette gaine de chair, restée étroite malgré les innombrables pénis venus y déverser leurs fluides, et de recevoir sur sa peau le ruissellement de ce sexe de femme. Il avait conscience d’offrir un spectacle peu commun et recevait comme un hommage les regards qui lui étaient donnés. Juliette ne ressentait aucune gêne. Même quand elle ne travaillait pas, elle se contentait de dissimuler son entrecuisse. À force de vivre ainsi depuis des mois, il lui était devenu pénible de remettre un vêtement, aussi léger fût-il.
Le couple revint de la sorte jusqu’au parc, où un cycliste manqua de faire une chute sous l’effet de la surprise. Ce fut à ce moment que la montre de Léo émit un signal sonore. Il la regarda et vit le nom d’Eumédia s’afficher.
Aussitôt, il la porta à son oreille et entendit une voix féminine :
Bonjour. Vous avez été sélectionné pour le prochain Jeu du sexe et de la mort. Veuillez vous présenter vendredi au taxi-port numéro huit à dix heures quinze, sans apporter de bagages. Vous serez conduit dans le bâtiment Eumédia où les préparatifs commenceront le jour même. Nous vous souhaitons bonne chance.
Léo en resta pantois.
Qu’est-ce qui se passe ? s’inquiéta Juliette, dont le vagin avait enfin été libéré de son poinçon.
C’est Eumédia.
Oui ? Et alors ?
Et alors, je suis pris.
Tu t’es inscrit au jeu et tu viens de recevoir la réponse ?
Oui.