J’aimerais être une goutte, pour tomber dans ses cheveux me frayer un chemin jusqu’à son front. Je m’y aventure doucement pour atteindre ses yeux et en faire le tour pour en soulignant la beauté. Du coin de son regard, je cours sur sa joue en direction du coin ses lèvres que je ne fais qu’effleurer avant d’atteindre son cou.
Quittant son visage, je m’arrêtais quelques instants sur son épaule pour admirer le trajet restant. Des montagnes séparées par une vallée et au loin une petite forêt. Je m’élance dans l’ascension de ce sommet et doucement j’en atteins la pointe avant de plonger tout droit dans la vallée. De là, je me rends mieux compte de la hauteur que j’avais prise et je passe de l’ombre à la lumière. Dans ce désert me séparant de la forêt, je me trouve dévié jusqu’à sa hanche. Bientôt, la forêt disparait à l’horizon.
Mais une nouvelle perspective s’offre à moi. Dans ce paysage lunaire, une nouvelle vallée entre deux proéminences, plus rebondies que les premières. Je m’engouffre dans cette vallée si étroite que l’obscurité prend le dessus et, après avoir contourné un petit aven, j’entraperçois à nouveau la lumière. Le temps de s’y habituer, une forêt est à nouveau à l’horizon. Serait-ce possible que ce soit la même que celle que j’avais perdue de vue ?
Cette forêt n’est pas si dense qu’il n’y parait et, au milieu, un gouffre immense. Je joue l’équilibriste sur cette fine paroi séparant la lisière de la forêt et la vertigineuse entrée en contrebas. De l’autre côté, j’aperçois un petit mont qu’il me plairait d’escalader, mais les lois de la physique me rattrapent et je suis aspiré hors de la forêt.
Roulant le long de sa cuisse lisse, je me retourne et je constate qu’il n’y a qu’une seule et unique forêt. Si je n’avais pas été dévié dans le désert, j’y serais entré par l’autre côté et j’aurais très certainement grimpé sur le mont de cette vénus. Mais je n’ai pas de regret à avoir, si tel avait été le cas, je n’aurais pas visité l’étroite vallée que j’aperçois de loin en atteignant le genou.
Ma chute continue le long de la jambe et, puisque je regarde toujours vers l’arrière, je peux apercevoir les deux magnifiques montagnes pointant fièrement au-dessus de la forêt. Je ne fais qu’apercevoir le désert qui a dévié ma route.
Ma chute se ralentit alors que j’arrive à sa cheville et, m’éloignant de sa jambe en glissant sur son pied, je distingue ce sourire que je n’ai fait qu’effleurer et ce regard dont je suis fier d’avoir souligné la beauté. Un dernier coup d’il vers ces cheveux, point de départ de mon voyage touchant à sa fin, retombant maintenant le long de ces montagnes joliment dodues.
Il ne me reste plus que le souvenir de mon voyage sur son corps maintenant que je m’en éloigne accompagné d’autres gouttes qui, elles aussi, ont fait ce voyage merveilleux sans pour autant avoir pris le même chemin. Certaines n’ont même pas effleuré son corps, n’ayant eu qu’une vue de loin. Je mesure alors la chance que j’ai eue car même les gouttes ayant eu la chance de rouler tout au long de son anatomie n’ont pas eu le privilège de mon parcours.
Ce fut un merveilleux voyage.